L'Enquête
Ce récit qui, par certains côtés, se rapproche de l’univers kafkaïen, avère progressivement sa dimension de Métaphore, une métaphore proprement cauchemardesque parce que sans concessions aux mensonges dont l’homme, et notre société, s’habillent habituellement pour camoufler leur abandon de la valeur humaine.
Au début de ce roman, l’Enquêteur débarque d’un train afin de mener une enquête sur les nombreux suicides qui ont lieu dans l’Entreprise d’une Ville indéfinie mais son programme subit des altérations graves : personne ne vient le chercher à la gare, il n’y a aucun repère dans cette ville et nul promeneur n’apparaît pour le renseigner tandis qu’une pluie glaçante le transperce. Après des heures de déroute, le héros parvient enfin dans un hôtel absurdement conçu et géré.
Le lendemain, l’Enquêteur se rend dans l’Entreprise aux pouvoirs vastes comme celui d’un gouvernement, avec son Responsable fou, ses travailleurs mécanisés à l’extrême et ses trajets insensés. Et la même dérive qui l’a saisi à l’entrée de la Villese répète, une fois encore, au sein de l’Entreprise..
Dans ce roman saisissant, Claudel, avec une plume riche mais rendue plus sèche qu'ailleurs par le sujet même qu’il aborde, nous démontre, images à l’appui, ces ravages que connaît l’homme contemporain quand la perte de Sens désoriente, quand l’homme n’est plus Homme mais fonction et apparence, quand l’absence d’Idéal asservit aux mouvements de groupes, quand le Faire absorbe la Pensée et quand l’individualisme-égocentrisme enferme chacun dans la cage de son petit moi ainsi qu’il apparaît en finale du livre.
Une fin dont, par ailleurs, bien des éléments me sont restés obscurs…